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La Psychologie en Algérie

Gangs : la violence gangrène les quartiers

23 Novembre 2012 , Rédigé par Haddar Yazid Publié dans #PSYCHOLOGIE

El-watan 05/10/2012 " Nous n’avons pas assez travaillé sur la décennie noire "


-Qu’est-ce qui pousse les jeunes à autant de violence ?

 

Pour les sociologues, les causes de la violence se résument à la dévalorisation par le chômage, par la stigmatisation (régionalisme, etc.) et par les discriminations (classe sociale, etc.), à l’incohérence de statut (diplôme sous-employé, non-reconnaissance sociale, etc.), à la justification morale de la violence, aux faibles compétences verbales (qui nous renvoient à l’échec scolaire), à la faible insertion sociale et, enfin, à l’exposition à des normes sociales délinquantes et violentes (les représentations de la violence dans le conscient et l’inconscient de nos concitoyens). Aujourd’hui en Algérie, la violence est omniprésente, de la cellule familiale jusqu’à un niveau social plus étendu.

L’absence de la représentation de l’Etat dans l’espace public cède la place à l’anarchie et à la loi du plus fort. La corruption, qui atteint des niveaux plus dangereux, a fragilisé les valeurs d’honnêteté, de probité et de respect des valeurs citoyennes. Par ailleurs, la famille, auparavant lieu sécurisant pour les enfants, a subi ces derniers temps un éclatement qui laisse forcément des séquelles. Ainsi, un adolescent, qui a vécu des violences, quelle que soit leur nature, risque toujours de les reproduire s’il n’est pas pris en charge sur le plan psychologique. C’est ce que j’ai constaté généralement dans mes consultations. Nous n’avons pas assez travaillé sur la décennie noire. L’erreur des autorités a été de tourner la page sans aborder les problématiques non résolues. C’est toujours le même scénario qui se répète, depuis la guerre de Libération à ce jour.

 

-Ces jeunes agissent souvent en bandes organisées. Peut-on parler de «gangs» de quartier ?

 

Ces adolescents sont en général issus des milieux populaires les plus démunis de capital scolaire. La force physique et les valeurs de virilité afférentes - éprouvées, attestées, confortées à travers des défis – deviennent des fondements de l’estime de soi et de la reconnaissance des autres. Cette espèce de capital corporel est à la fois le moyen de se faire respecter et de se faire un nom dans le quartier. Ce phénomène des bandes est en Algérie à l’état fœtal, mais pourrait prendre de l’ampleur dans les années à venir.

 

-Le gang est appelé «complot» dans le milieu délinquant, et il est dirigé par un zenda (chef). Comment les membres de la bande s’identifient-ils à leur leader ? Et quelle est l’image de celui-ci dans leur imaginaire ?

 

A ce jour, il n’existe à ma connaissance aucune étude sur le profil de ces jeunes engagés dans les bandes de rue ou autre, la relation de ces bandes avec des organisations criminelles, leur implication dans le trafic de stupéfiants, la prostitution et les fraudes en tous genres, ni sur la façon dont elles se structurent. A ce jour, les statistiques publiées par la Gendarmerie nationale et la police restent dans la description des actes de criminalité et les personnes délinquantes (âge, sexe, lieux, etc.). Ces statistiques ne sont pas suivies par des études sociologiques, psychologiques et criminologiques pour mieux cerner la problématique et surtout proposer des stratégies, préventives et répressives pour arrêter ou tout au moins freiner le développement de ces bandes en Algérie.

 

-Ces jeunes sont réputés réfractaires à la loi et à la discipline. Comment évoluent-ils dans cette structure hiérarchique ? Qu’en est-il de leur notion de code d’honneur ?

 

Le code d’honneur pourrait s’appuyer sur la tradition, l’exemple de respect qu’ils gardent à l’égard de la mère et des personnes âgées. Cependant, il est encore prématuré de parler d’un code d’honneur qui existerait, car à l’état actuel, les bandes sont en cours d’organisation. Elles ont besoin de temps pour s’organiser d’une manière plus hiérarchique et imposer leur code, comme c’est le cas en Italie ou au Mexique, au Brésil, etc. A ce rythme, ces groupes pourraient renforcer leur pouvoir et imposer leur loi dans les quartiers. Mais ils pourraient entrer en concurrence avec le phénomène religieux pour le contrôle des quartiers. 

 

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